La ville des gens : 17/novembre
Mourir un 14 Juillet, fallait oser… Cette année là, Léo l’a fait !

N’y aura-t-il donc vraiment… désormais plus rien de nouveau signé Léo ?


Je n’ l’ai jamais rencontré chez l’ boulanger, pas davantage au bistrot d’à côté, il n’était pas du quartier c’ gars là… et pourtant, même ici, qui ne sait qui il est ? C’est de toi Léo que je parle, à toi… aussi que je m’adresse, s’il te plaît… ne m’envoie pas balader !

… Léo, tu ne soupçonnes pas l’effet que ça m’a fait quand j’ai appris que dans un ultime bras d’honneur, en ce jour commémoratif d’une déjà lointaine Révolution, tu
venais de claquer ton dernier pétard !

à ta façon…
tu avais toujours quelque chose à dire
et souvent tu chantais
à ta façon…
au Cabaret plutôt qu’à la Télé !
as-tu seulement été invité ?
en tous cas c’est sûr
Chanter…
ça tu aimais !

Ta façon… ? c’était la chanson, ta façon… et quelle chanson ! Textes et musiques par ton tempérament portés, bien au-delà de la scène et des bacs à CD(s). C’est dire si elle me va… longtemps je l’écouterai ta façon !
Toi qui t’endormais tard…
comme un vieil anar las des bars bavards faut croire, t’as rompu les amarres quand t’en as eu trop marre, et pourtant… bavard, bavard tu l’étais ! de ceux… si rares, qui ne devraient se taire jamais !

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Léo Ferré. Novembre 1990.

Quand la nouvelle a circulé… tu parles d’une nouvelle ? il a fallu encaisser, boire un peu pour y aider ! Mais après le dernier verre il a bien fallu aussi, oui… pour de bon qu’on t’enterre ! Je n’y étais pas, n’étant ni de la famille, ni de la sphère, mais je sais que dans le vieux cimetière il y eut une émotion particulière, quand sous le ciel a baissé la lumière ! Dans le trou à jamais, à ton tour… soudain tu disparus !

Merci Ferré d’avoir écrit… de ta plume trempée pour ne pas oublier ! d’avoir dit et d’avoir ri…, d’avoir pleuré, d’avoir chanté ! Y en a pas un sur cent et pourtant… !
D’avoir gueulé si fort quand t’étais pas d’accord, d’avoir été sans céder au chiqué, d’avoir parlé sans cacher tes idées et jusque dans tes silences ! Comme tu disais… le bonheur qu’est ce que c’est ? Je t’entends encore… Qu’est ce que c’est ?

On s’était tant habitués, saura-t-on te pardonner de te taire désormais ?

Tout haut tu rêvais quand tu chantais, et maintenant… ça nous manque, ou plutôt… tu nous manques ! Ah comme on aimait… tes mots tant ils en disaient, vifs comme un cheval fauve sur la piste d’un cirque ignoré ! C’est bien ça, quelqu’un manque… qui s’appelle Léo, Ferré de son nom, qui parlait haut, clair… si poétiquement clair et politiquement chaud !… qui pensait… autre et différent, ardent et… chaud devant les idées prêtes ! Vacillez fades idées reçues ! Ardent aussi quand il chantait… bien que n’étant pas maçon, beau… à sa façon !

Léo, le sais-tu ?… par delà les scènes où tu t’avançais le crin dressé, ton verbe et ton chant mêlés…, avec tes mots… parfois dégoupillés ou plus souvent germés, tes mots ferments, par tous les temps, tu l’as semée ta graine, bel et bien ! Ta graine de chez… "Lagraine-Ferré" sans gènes trafiqués, garantie "Naturlish" et… secrète déesse des friches ! C’est dire combien le risque est mince et lointain, qu’on te prenne un jour pour un VRP griffé Vilmorin ! Vous imaginez… Léo, voyageur représentant placier du plus annoncé des grainetiers ?

Ainsi semée, par des vents complices propagée, par bonheur il y en a, de quoi augure-t-elle ? Graine de… ou bien de… ? Te concernant Léo, la question fournit la réponse, mais… est ce vraiment la bonne ? Graine d’anar ou… pas graine d’anar ? Tu l’as laissé dire, et même un temps revendiqué ! C’est vrai… les anars et toi, ça allait bien ! puis… on ne sait trop comment, il s’est mis de la distance entre l’anar et l’anarchie ! Pour un homme libre, c’est normal quand on y réfléchit ! Alors ? Graine de… à tort mésestimée, Graine de rêveur ! Car oui, tu étais bien de ceux qui rêvent debout quand d’autres… mais peu importe, ils font c’ qu’ils peuvent ! Rêveur… strictement vêtu de ton talent de conteur, tantôt rageur, tantôt provocateur, vois donc… ou mieux encore écoute ! écoute comme malgré l’intempérie toujours elle s’épanouit… ta "chose" de rêveur ! et, se foutant des rigueurs, soulève déjà la terre prête à filer prendre l’air… dans le vocabulaire ! Oui Monsieur… dans le vocabulaire !

Si on ne la voit pas… , si on ne la voit pas qu’on ne s’y trompe pas… elle est là, prête à donner de la voix ! C’est ainsi… la poésie, ça ne se voit pas… c’est là ! ça se balance au gré du vent, sous le nez des gens… , sous le nez des gens !

Là où tu es… , du côté de chez "ColinMaillard", est-ce que c’est vrai, j’ai lu quelque part que tout s’y passe dans le noir ?
Là où tu es… je te salue cher Ananar ! Paraît que t’es peinard ! On dit même que plus ça va… , plus tu te marres !
Pour qui veut y croire, le bruit court que tu reviens parfois faire la foire avec des potes, mais personne… jamais n’a pu te voir !

On t’attend un de ces soirs… au Panam’bar, au C-bizarre ou…
à l’Arrosoir ! Trois vieux et beaux bars où l’on vit tard, et pleins… tous les soirs, où l’addition se règle d’une chanson, où l’espoir est…
une question !
Prêt du comptoir, pour sûr… on n’est pas des saints ! c’est pas d’main qu’on en s’ra, mais quand tu chantes…
c’est extra !… c’est extra !


Tu viendras ? dis… tu viendras ?


Gram MANEGE (Juillet 2003)

Extrait de la revue Chorus.
Les cahiers de la chanson n° 44. Été 2003.



Article mis en ligne en 2010 par Mr Antoine Seck, collaborateur à La Ville des Gens. Actualisé en novembre 2014.

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