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Espoir, quand tu nous tiens !

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"L’Esprit de 45" ! Un regard affûté, celui du réalisateur Ken Loach…

mais aussi, la lumière d’un projet social possible qu’il est bon de rappeler aujourd’hui, dans un tout autre contexte bien sûr !

Notre blog n’est nullement spécialisé dans le commentaire cinéphilique, il n’est d’ailleurs spécialisé en rien, nous y parlons simplement de ce qui nous intéresse et nous touche, parfois nous fait question ou nous inquiète, parfois nous enchante ! Nous y parlons de ce que la vie nous donne à connaître, à partager, à réfléchir !

En l’occurrence, ayant eu l’occasion d’assister au cinéma du Panthéon, à la projection en avant première (gratuite et ouverte à tous, c’est assez rare pour être signalé !) du nouveau film de Ken Loach, il m’est impossible de ne pas vous en parler ! Et cela pour 2 raisons :

La première est que ce film est captivant, la seconde est qu’il est un excellent prolongement à notre précédent article dans lequel, déjà, nous n’avions pas résisté à citer les mots de Ken Loach, interrogé lors de la disparition de Margaret Thatcher !

Ce n’est pas que nous soyons accrocs, ni à Ken Loach, ni à quiconque d’autre, c’est simplement que ce qui est donné à voir là, et à réfléchir, est d’une grande pertinence, et puissamment éclairant !

Si le sujet est grave et pourrait risquer l’austérité, le talent du réalisateur déjà nommé, en fait pourtant un film passionnant, et porteur d’espoir !

De quoi s’agit il ?

Bref rappel historique (s’il en était besoin) :

Mai 1945 : Fin de la 2ème guerre mondiale, et avec elle la Victoire des alliés sur l’Allemagne Nazie ! Partout c’est la liesse ! A Londres, Winston Churchill, véritable héros, salue la foule…

La Grande Bretagne de 1945 sort donc des ruines de la guerre, unie autour de son héros Churchill. Pour autant, le peuple qui n’a pas oublié les années de douleur, de grande pauvreté, et de misère de l’avant-guerre, est prêt à engager une nouvelle bataille, celle qui permettra l’avènement d’un nouvel idéal social de solidarité [1]

La fraternité est alors devenue le mot d’ordre principal du pays !

Reconstruction enthousiaste, recherche de plus d’égalité

Pour fonder ce monde meilleur, la population est prête à se débarrasser des conservateurs… et c’est bien ce qui va se passer !

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affiche de la campagne électorale du parti travailliste en 1945

Oui, c’est bien ce qui va se passer !
Aux élections générales de Juillet, le parti travailliste, emmené par Clément Attlee et son programme de réforme sociale profonde, l’emporte sur le parti conservateur de Winston Churchill avec une très large et confortable avance, du jamais vu !

La nouvelle politique volontariste de redressement du pays pour une société plus égalitaire, où chacun pourrait avoir une place décente, est donc rapidement engagée. Engagée, tant au niveau économique, avec des nationalisations de services et d’industries vitales pour l’emploi, que social (création de logements sociaux, mise en place d’un système de santé, etc).

La population apprécie, et les travaillistes l’emporteront à nouveau aux élections suivantes en 1950, mais cette fois, et pour des raisons diverses, avec une majorité plus courte. De ce fait, de nouvelles élections seront rendues nécessaires en 1951. Élections que cette fois les travaillistes perdront, à cause du système électoral semble il (ils ont plus de voix qu’en 1945, et plus de voix que les conservateurs… mais moins de sièges).

Toutefois, les conservateurs de retour au pouvoir, ne s’engageront pas dans la voie du retour en arrière systématique. Disons, dans un raccourci sans doute un peu approximatif, que jusqu’à l’arrivée de Margareth Thatcher comme 1er Ministre en 1979, l’Esprit de 45 fut, dans ses grandes lignes, un peu préservé. Hélas, à partir de 1979 il va en être tout autrement !

Le démantèlement, la destruction programmée

De ce point de vue, la désignation de Mme Thatcher à la tête du gouvernement britannique marque un basculement radical et brutal, et l’on va assister sous ses mandats successifs à un démantèlement systématique des mesures prises par ses prédécesseurs, autrement dit à la destruction programmée de l’œuvre des travaillistes.

C’est tout l’intérêt de ce documentaire de mettre en évidence, à partir de documents d’archives, actualités de l’époque, témoignages de personnalités intellectuelles ou non, historiens ou politologues, anciens mineurs, dockers, syndicalistes ou non, infirmières… ce détricotage programmé et idéologique, de ce que d’autres avaient eu tant de difficultés à mettre en œuvre pour le bien de tous !

Tous ces témoignages, sans exceptions, sont extrêmement forts et empreints d’une grande émotion qui en dit long sur le vécu de tous ces gens, ces gens grâce auxquels l’intérêt de ce documentaire ne faiblit jamais !

Inutile de rappeler les conséquences dramatiques de cette casse décidée (il suffit d’entendre M. Thatcher citer Saint-François d’Assise pour comprendre son degré de cynisme, et l’escroquerie démesurée que, par ce biais, elle s’est autorisée).

Au rang des dégâts : crise industrielle, licenciements, chômage massif, mise au pas violente des mouvements sociaux… C’est le retour au seul crédo de l’individualisme, de la course au profit, du capitalisme débridé et sans le moindre contrôle ! Du bien connu, du trop connu… qui ne peut que nous faire penser aussi à la crise en cours !

Si la personne de M. Thatcher en elle-même ne nous intéresse guère, son pouvoir de nuisance, lui, a été tel (même si elle a toujours des partisans) qu’il est important que ce cinéaste aguerri, nous rappelle ici, par ses souvenirs et son vécu illustré, la belle expérience britannique de 1945 qu’elle mit tant d’énergie à anéantir.

Ce n’est pas d’aujourd’hui, Ken Loach [2] est un cinéaste engagé, une fois de plus, à travers ce film-documentaire il fait œuvre utile, éclairante, et il le fait avec talent.

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Ken Loach

Il n’explique pas, il préfère montrer, mettre en perspective et en évidence. En donnant ainsi à voir et à entendre ce qu’il faut voir et entendre… ce qu’il faut avoir présent à l’esprit, il accomplit une tâche fondamentale !


Il y aura c’est sûr, des gens pour critiquer et déprécier ce travail, on sait même déjà à peu près ce qu’ils vont dire, film militant et naïf, ou des choses de ce genre… c’est naturel !


Ce film est incontestablement de parti pris, mais d’un parti pris enrichissant tant il apporte d’éléments au dossier ! C’est en cela qu’il trouve sa force, et sa capacité à relancer l’espoir en la possibilité, jamais abandonnée (dans nos esprits au moins, en attendant mieux), de changement vers le progrès social ! Progrès social… cette expression tend au pléonasme, le progrès pourrait il être sans être social ?

C’est un Film-Manifeste en quelque sorte, à chacun, notamment à ceux qui sont en charge des responsabilités, de s’en inspirer au mieux !

Tout est question d’échelle dites vous ? Mais, même à l’échelle Européenne (sauf à le refuser par principe, et alors il faudrait le dire !) avec un peu de générosité lucide et d’intelligence collective… un tel projet devrait bien être possible, non ?

« L’Esprit de 45 », un documentaire [3] à ne rater sous aucun prétexte !

Ci-dessous, lien d’accès éventuel à notre précédent article du 14/04 : À penser... ne renonçons jamais

- Denis Richard (Quartiers Libres, 07/05/2013)


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[1à noter qu’en France, en 1944 le Conseil National de la Résistance (CNR) avait, lui aussi, établi un programme marqué par l’idéal social de solidarité et de progrès. C’est d’ailleurs ce programme qui sera pris en compte, et mis en œuvre par le Gouvernement à la Libération.

[2Réalisateur lucide et engagé, Ken Loach s’est imposé comme le fondateur de la vague néo-réaliste du cinéma britannique.

Filmographie :

  • 1967 : Pas de larmes pour Joy (Poor Cow)
  • 1980 : The Gamekeeper
  • 1990 : Secret défense (Hidden Agenda)
  • 1995 : Land and Freedom
  • 1996 : Carla’s Song
  • 2000 : Bread and Roses
  • 2002 : Sweet Sixteen
  • 2006 : Le Vent se lève (The Wind that Shakes the Barley)
  • 2009 : Looking for Eric
  • 2010 : Route Irish
  • 2012 : La part des anges
  • 2013 : L’Esprit de 45

[3ce documentaire a été sélectionné au dernier Festival de Berlin, diffusion en France à partir du 08/05

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