La ville des gens : 8/juin

Vivian Scheihing, une artiste du 19e


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Le 19e arrondissement accueille de nombreux artistes. L’équipe de Quartiers Libres a déniché à la Villette, tout nouveau quartier que Paris a voué aux arts et sciences, une singulière artiste chilienne.

Après dix ans de démarches, Vivian Scheihing se voit attribuer par l’intermédiaire de la Ville de Paris, un atelier où enfin elle peut poser toiles et pinceaux.

C’est là qu’elle nous reçoit, dans ce lieu qui malgré de nombreux défauts de conception, de réalisation lui permet de vivre et peindre. Nous ne la connaissons pas, elle ne sait pas ce que nous attendons d’elle mais immédiatement notre trac de journalistes néophytes, fond au contact de son sourire, de sa simplicité, de sa chaleur toute américano-latine.

Happées par l’intensité lumineuse, dramatique et sauvage des tableaux qui encombrent l’espace, nous restons sans voix.

Elle naît au Chili à Valdivia, port balayé de furieuses tempêtes qui se brisent sur les pentes des montagnes vertes. En 1973, les évènements politiques l’obligent à quitter son pays. La route de l’exil qui fut un véritable déchirement, la mènera de Londres à Paris, en passant par l’Allemagne et les États-Unis.

Son œuvre au tracé mouvementé porte les marques de l’errance et les réminiscences de son enfance. Sa peinture de force maîtrisée, d’énergie contenue n’en est pas moins empreinte d’une grande émotion. Par un biais émouvant de modernité et d’anarchisme mélangés, elle vous fait pénétrer dans un monde chaotique, architectural dont le dénominateur est sensibilité, esprit et mouvement. Au cours de notre entretien, avec véhémence et insistance, Vivian Scheihing est revenue sur sa spécificité de peintre, nous disant : « la Peinture est la peinture »· Pour elle, il est vain de vouloir y trouver des marques spécifiques de féminité ou de masculinité.

Interloquées, nous lui demandons ce qu’elle entend par là. Et Vivian de nous répondre en riant : « Très souvent, les gens attribuent mes tableaux à un homme et ont du mal à accepter que j’en sois la génitrice. Apparemment, ils y trouvent trop d’ardeur, trop de fureur pour penser que ce puisse être l’œuvre d’une femme comme moi. Très prosaïquement, il faut aussi dire que Vivian sans le "e" habituelles conduit naturellement à me voir en homme et les conforte dans l’appréciation de l’œuvre. »

Si la peinture est l’essence même de sa vie, Vivian a dû et doit assurer le quotidien.

Ni ses diplômes, ni son œuvre reconnue ne l’ont empêché d’accepter toutes besognes : femme de ménage, serveuse, professeur dans différentes écoles d’art, animatrice au service de diverses associations y assurant l’accueil et le déroulement des manifestations. Tout plutôt que cesser de peindre, vivre comme l’on peut avec ce que l’on a… Vivian Scheihing a participé à de nombreuses expositions en France et dans le monde et a toujours recueilli des articles enthousiastes sur son art.


Jacqueline RUIZ
Lily SLYPER



Article mis en ligne en juin 2015.

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