La ville des gens : 23/octobre

Le quartier vu par les Pompiers

Les pompiers « de Paris » résident pour la plupart en province, et hors intervention les contacts avec le quartier sont plutôt rares.

Le 19e, c’est sympa quand on le voit de l’extérieur, quand on est dedans c’est autre chose : c’est Dr Jekyll et Mr Hyde ! La première visite donne une bonne impression, ensuite, sur le terrain, cela se détériore. Il y a 2 visages du 19e : le jour et la nuit.

Ce qui m’a choqué, ce sont les agressions. C’est dans cet arrondissement qu’il y en a le plus.
Les paroles sont assez brutes, il y a des insultes. Pour nous, ce n’est pas facile. Evidement, lorsqu’on se rend chez les gens, nous ne voyons pas l’aspect le plus joyeux.

C’est vrai par ailleurs que nous sommes en contact avec un petit pourcentage de la population qui n’est pas forcément représentatif. La frange que sommes le plus amenés à fréquenter est la plus faible économiquement et socialement.

Quand on regarde de près, même les incendies sont relativement sectorisés dans les zones les plus pauvres où l’habitat est dégradé et où les populations sont moins bien informées.

C’est vrai aussi que le 19e est l’arrondissement le plus jeune de la capitale, ceci explique peut-être en partie en partie cela.

Je sais que mes prédécesseurs avaient l’habitude de diviser le 19e entre un Nord plus pauvre et un Sud plus aisé. En ce qui me concerne, depuis un an que j’ai pris mes fonctions, je ne vois pas beaucoup la différence. Il n’y a que le secteur autour de la Mairie et des Buttes Chaumont qui soit plus tranquille. En revanche, Stalingrad était réputé pour la fréquentation malsaine, mais ça s’est nettement amélioré.

Les SDF. Quand ils en voient, beaucoup de gens nous appellent. Les personnes à la rue veulent souvent aller à l’hôpital : c’est la solution de facilité ! Car elles savent que là-bas elles auront un lit pour se reposer, de quoi manger et qu’on prendra soin d’eux. Mais ce n’est pas le rôle des urgences ! qui va payer le plateau repas ? Dans le quartier, je ne connais pas de centre d’accueil, alors nous appelons le 115.

Avec les SDF, cela dépend des individus : certains sont agressifs et d’autres sont gentils.

Un autre point : il y de moins en moins d’accès public à des points d’eau potable, c’est un problème pour ces personnes.

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La caserne est isolée

Au quotidien, nos interlocuteurs sur le terrain sont EDF, pour la gestion des risques ; la Police nationale, avec qui nous faisons beaucoup d’interventions ; et enfin, les services sociaux auxquels nous remontons les infos, mais nous n’avons pas de suivi des cas. Sinon, nous n’avons pas de rapports avec le quartier.

De plus, la caserne est isolée : elle est située entre le square, l’église, le marché et l’école, nous n’avons pas de voisins directs. Il n’ y a que le 13 juillet que nous pouvons avoir des rapports avec la population.

Le 13 juillet 2005 justement, j’ai organisé mon premier bal, et avec tout ça je n’étais pas franchement rassuré. Pourtant, contrairement à ce que je craignais, tout s’est extrêmement bien passé.

L’architecture du quartier est très spéciale. Cela n’a rien à voir d’un bâtiment à un autre. Des tours de 40 étages cohabitent avec des courettes, on trouve encore des petits pavillons dont la structure est en bois.

Il y a une grande diversité ethnique : on trouve des Israélites, des Africains et des Maghrébins, des Asiatiques, des personnes provenant d’Europe de l’Est.

Pour la promenade, il y a le quartier de la Mouzaïa, en haut des Buttes Chaumont, qui est très plaisant.

Le marché de Joinville, situé juste derrière la caserne, est très agréable en tant qu’habitant. Mais d’un point de vue professionnel, c’est une calamité. Les manœuvres pour sortir les véhicules sont rendues impossibles par les palettes entreposées n’importe où. Toutes les semaines ça recommence, et il arrive que les véhicules d’autres secteurs arrivent sur les lieux avant nous.


Le canal
 : évidemment, ça c’est très chouette ! Nous avons la chance de jouir d’une vue exceptionnelle dessus.