La ville des gens : 27/janvier

Avec les bergers d’Une Chorba pour tous

Condamnée à déménager pour cause de réhabilitation des bâtiments du 168 rue de Crimée, l’association humanitaire Une chorba pour tous, dont une des priorités est de distribuer les repas quotidiens aux plus démunis, a peu d’espoir de retrouver des locaux avec cuisine. La Ville des Gens a voulu en savoir plus sur ceux qui font vivre ce bastion de l’humanitaire.

Après avoir fait grincer la lourde porte en fer de l’entrée des locaux, je rencontre Rédha, le cuisinier bénévole et son “collègue†Marco, médiateur social tous deux installés dans la cuisine. Je devine immédiatement la présence de ce lieu hautement stratégique à travers les odeurs laissées par les préparations des derniers repas.

Ils m’accueillent spontanément en attendant que Chafia Azouni, la directrice administrative administrative de l’association ne me reçoive dans son bureau. Ce matin, comme tous les matins, elle a du mal à se garer dans le quartier.

La cuisine, où près de 900 repas sont préparés chaque jour, est une petite pièce un peu vétuste où s’entassent marmites et bombonnes de gaz. Un petit cœur en tissu rouge au milieu duquel est écrit « I love you » est accroché à l’angle du mur.

Un cœur d’agneau et un œil de berger

Rédha, 55 ans, Algérien d’origine, l’allure filiforme, les cheveux longs, noirs, attachés en queue de cheval, les yeux soulignés de khôl est un des hommes à tout faire de l’association.

« C’est moi qui prépare seul tous les jours les 900 repas pour les distributions du soir à Stalingrad et à Barbès, mais au moment du Ramadan, le président vient m’aider pour faire les 1 300 chorbas par jour qu’on distribue sous le chapiteau. A ce moment-là, on utilise la salle d’à côté pour avoir plus d’espace. »
Dans cette salle qui doit également servir d’espace d’accueil, des sacs de riz, de haricots, et de farine sont posés en vrac sur les tables, des conserves de tomates sont stockées à même le sol à côté du meuble de la bibliothèque. A droite de la cuisine, une peinture naïve représentant des femmes autour d’un chaudron et tenant dans leurs mains une assiette de soupe décore le mur.

C’est là que nous prenons un café et que Rédha me parle de son engagement.
« Je suis là depuis le début de la création de l’association en 1992, au moment des tremblements de terre en Algérie, j’ai été embarqué dans l’aventure par une des fondatrices, Aït Kaci, qui tenait un cabinet dentaire.

« Si je suis là c’est parce que j’ai du cœur, un cœur d’agneau et un œil de berger » dit-il d’un air espiègle avant de retourner à ses fourneaux. « Ca fait 22 ans que je vis dans le quartier, je pense que ça pourrait aussi m’arriver un jour d’être dans la rue, je me mets à la place de ces gens-là. Je fais pas de politique, je juge personne, je me pose pas la question de savoir d’où ils viennent, ce sont des êtres humains avant tout. »

« Cette année, il y a de plus en plus de monde pour la distribution des repas, on voit beaucoup d’Afghans, ceux qui ont été rejetés de Calais, des Tchétchènes, des Iraniens, mêmes des familles de Français, et puis il y a aussi les Enfants de Don Quichotte, les SDF du quai de Jemmapes, à qui on donne à manger ».

« Pour vivre, je fais des petits boulots à côté, je me contente de peu, vous savez, on était 13 à la maison à Alger, on y arrive avec peu de choses, avec une bonne éducation. »

Quand il ne fait pas la cuisine et qu’il ne distribue pas les repas, Rédha offre ses services pour des petits travaux, des déménagements, distribue des vêtements, des médicaments, des meubles, bref il sait et aime se rendre utile.

« On fait aussi des maraudes autour des gares de l’Est et d’Austerlitz avec le camion, là on a affaire à des drogués, des gens chauds, agressifs, nous aussi on a le sang chaud, on est des méditerranéens, mais on s’écrase parce qu’on sait pourquoi ils sont comme ça. »

La générosité, la beauté du quartier

« J’habite dans le quartier de Stalingrad depuis 1987, pour moi le 19ème arrondissement c’est le plus beau quartier de Paris, j’arrive pas à le quitter.
Les gens sont multiculturels, même le traiteur israélite Maxime donne à l’association, et la pizza du quartier a aussi donné un frigo, c’est ce qui fait la beauté du quartier »

Ses lieux

Avenue de Flandre : il y a tout pour le shopping
Le Parc des buttes Chaumont : un des plus beaux parcs de Paris avec le Luxembourg
Le Parc de La Villette
Le Canal et ses cinémas

Le Café de la Musique devant la grande Halle de la Villette et la Fontaine-aux-lions
« Il y à une bonne ambiance, un piano bar et quand il y à une interprète, je lui demande de chanter les chansons que j’aime ». Café de la Musique
213, avenue Jean Jaurès, 75019 Paris
Ouvert tous les jours de 8h à 2h du matin

L’association en chiffres

- 12 membres du Conseil d’Administration
- 170 bénévoles environ à l’année
- 5 salariés
- 200 colis alimentaires distribués par mois.
- 900 repas distribués par jour à Stalingrad et Barbès
- 150 000 euros environ de budget annuel


Une Chorba pour tous collabore avec

- Les enfants de Don quichotte
- La Mission évangélique du 19ème arrondissement
- Les restos du cœur
- Le secours populaire…

Ingrédients de la Chorba

- Oignons, céleri, carottes, pommes de terre, menthe, coriandre, tomates concassées, concentrés de tomates, vermicelles cheveux d’ange, mouton.

La Chorba est une soupe d’origine maghrébine très nourrissante servie au moment de la rupture du jeûne pendant le Ramadan.


Géraldine Bernard, janvier 2010


Pour en savoir plus

Tél : 01 40 36 17 50
contact@chorbapourtous.org
www.chorbapourtous.org

Lire aussi Chafia et Ali dirigeants d’Une Chorba pour tous

Agenda

Une Chorba pour tous

168 rue de Crimée
75019 Paris