La ville des gens : 27/janvier

Chafia et Ali dirigeants d’Une Chorba pour tous

Chafia Azouni est directrice administrative d’Une Chorba pour tous, dont l’activité est aujourd’hui en danger. C’est une femme coquette, dynamique et chaleureuse qui m’invite à la suivre dans son bureau où en ces jours froids d’hiver, le petit chauffage d’appoint n’est pas superflu.

C’est là, dans ce tout petit espace envahi de dossiers que Chafia mène son combat humanitaire depuis 4 ans. Gestion du personnel, courrier, factures, demandes de subventions, de renouvellement de partenariats [1] et autres détails administratifs sont le quotidien de cette salariée à plein temps.

En ce moment, elle se consacre tout particulièrement au fléau de l’illettrisme. Aussi est-elle fière de nous parler de ce projet de pièce de théâtre sur le thème du dialogue intergénérationnel qui rapproche enfants et adultes : « Il permet de sortir les personnes inalphabètes de leur isolement, favorise leur intégration et leur expression. »

Un engagement de la première heure

Chafia est arrivée en France il y à 15 ans après avoir fui l’Algérie et la montée de l’intégrisme. Habituée aux responsabilités dans son pays d’origine, et marquée profondément par l’expérience de l’exil, c’est tout naturellement qu’elle s’est engagée dans l’associatif humanitaire, « il est important de tendre la main aux autres quand on a soi-même souffert », affirme-t-elle avec conviction.

« Avant d’intégrer l’équipe d’Une Chorba pour l’hiver, qui était le premier nom de l’association Une Chorba pour tous, et j’insiste pour qu’on ne la confonde pas avec l’autre association La Chorba, je travaillais dans une autre structure humanitaire à caractère plus scientifique pour l’accompagnement des maladies graves, le sida par exemple.

Je m’occupais des travaux d’orientations, car la maladie conduit souvent à la précarité et à l’exclusion. Cela m’a amené à collaborer avec Une chorba pour l’hiver. Un jour, l’association a fini par me demander de la rejoindre pour développer les partenariats. »

Le quartier le plus jeune de Paris, maltraité par les médias

« Ici avec l’association qui est un lieu de rencontre de différents publics, on voit le vrai visage du quartier, les difficultés des jeunes. Le 19ème arrondissement est le quartier le plus jeune de Paris. Il y a un mélange multiracial, une cohabitation facile entre communautés et une vraie vie de quartier. »

Mais Chafia est en colère contre la façon dont les médias traitent des problèmes de délinquance. « On parle de bagarres interreligieuses alors qu’il n’y a aucune implication religieuse, ce sont des problèmes de délinquance mais pas de religion, il n’y à pas besoin de rajouter à chaque fois que ces jeunes sont arabes, musulmans ou autres. »

Elle aimerait que « toutes les mamans soient fières de leurs enfants et pour cela il faudrait que l’état les aide dans leur éducation. Il faudrait dire aussi que les enfants issus de l’immigration sont capables de réussir, que c’est possible. »

Ceci est d’autant plus important pour elle qui à son arrivée en France, s’est consacrée entièrement et sans aide à l’insertion de ses enfants alors adolescents. Aujourd’hui leur réussite est pour elle une vraie source de joie et de fierté.

La pauvreté au quotidien

Elle est aussi révoltée de voir qu’on ne parle de la pauvreté que pendant l’hiver, le grand froid alors que « les gens, eux, ont faim toute l’année. »

Son espoir partagé par Ali Hasni, le président de l’association, qui entre-temps nous a rejoint dans le bureau, serait que « les gens ne soient plus amenés à être dans cette situation.

On aimerait pouvoir les servir dans la dignité, dans un espace fermé comme dans un restaurant car la pire image est de voir au moment de la distribution des repas, ces mamans avec leurs enfants s’accroupir sous la pluie pour manger ». Ali en a plusieurs fois pleuré.

Le meilleur souvenir

« Tous les soirs à 19h, au moment de la distribution à Barbès, quand on voit les gens qui font la queue depuis 16h (car il y a du monde !) faire un petit sourire en voyant arriver le camion, comme des enfants devant leurs cadeaux de Noël ou devant leur mère qui revient des courses, c’est notre récompense. »

Un appel aux pouvoirs publics

Chafia et Ali qui sont réellement inquiets quant au devenir de leur association et de ses locaux, souhaiteraient ardemment que les pouvoirs publics prennent en charge leur problème, quitte à partager une cuisine avec d’autres associations. Pour attirer leur attention, ils organisaient d’ailleurs mercredi 20 janvier à destination de tous, une nuit porte ouverte avec distribution de thé à la menthe.

Lieux préférés

- La Mascotte
C’est notre succursale, ce qu’on aime c’est que c’est un café fréquenté par beaucoup de communautés, d’artistes maghrébins, juifs et français « comme au temps où à Alger, toutes les communautés vivaient en harmonie, se fréquentaient » rappelle avec un ton de nostalgie Ali, le président.

La Mascotte :
174 rue de Crimée - 01 40 36 03 86
Le midi, menu (plat + dessert ou café) à 9 euros
Restaurant oriental

- Le 104 : lieu culturel
104 rue d’Aubervilliers/5 rue Curial
75019 Paris
33 (0)1 53 35 50 00 / information billetterie
Horaires : ouvre tous les jours, sauf le lundi, de 11h à 20h (sauf en cas d’événements exceptionnels)

- La Cité de la Science et la Cité de la Musique, car c’est bien pour les enfants, il y a plein de choses à découvrir.



Article réalisé par Géraldine Bernard, en janvier 2010


Contacts actualisés en 2015 :

Adresse : 108, rue curial - 75019 Paris - Métro 7 – Arrêt Corentin Cariou - Tram T3 – Arrêt Porte de la Villette


Lire aussi Rencontre avec les bergers d’Une Chorba pour tous

[1] en 2009, Air Algérie a offert des billets d’avion à l’association pour la période du Ramadan, Chafia espère que la Compagnie aérienne sera aussi généreuse en 2010

Agenda

Une Chorba pour tous

168 rue de Crimée
75019 Paris