La ville des gens : 18/octobre

Daniel, 25 ans, musicien

Ici, on bouge pas de son petit quartier. Il n’y a pas d’activité dingue, mais c’est ouvert, c’est populaire. C’est ça que j’aime.

Daniel se présente.

« Je suis né à Clamart, mais j’ai toujours vécu à Paris , je suis "un vrai Parisien", ça fait un an que je suis dans le 19e.

J’ai fait des études de sociologie, mais je suis musicien. Je fréquente surtout des jeunes de mon âge tous plus ou moins artistes, des photographes, des graphistes, des cinéastes, et des musiciens bien sûr. »

Daniel

« Je fais de la radio, des émissions sur Fréquence Paris Plurielle, Radio Libertaire ou Media Tropical.

Depuis 8 ans, je suis aussi DJ, je fais partie d’un collectif de DJ, Le Sambalek, avec lequel on organise des soirées.

J’ai réalisé 2 albums, 1 de funk et 1 de hip-hop.
A côté, je fais aussi des petits boulots pour gagner ma vie, là je suis à la recherche d’un emploi. »

Mes lieux

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Les Voûtes - La Régalerie

Les voûtes. Il s’agit des voûtes qui passent sous les anciennes voies de chemin de fer de la Petite Ceinture, il y a toutes sortes d’ateliers qui sont installés dessous. « J’y vais souvent, j’ai des copains qui ont un studio, on va faire de la musique là-bas. En hiver, c’est plus compliqué, mais en été c’est sympa, car tout est ouvert et les gens sont dehors.
 »

Les épiciers de l’avenue de Flandres. « Des fois, il y a 40 personnes qui squattent devant, ils connaissent les types qui bossent dedans. Ils tapent la discut’. Les “grosses caillera” passent s’acheter des bonbons. C’est un lieu de vie.

J’aime aussi le karaoké chinois qu’on trouve dans certains restaurants du quartier, c’est tout un univers. »

La Baraka. « C’est un petit café de quartier, typique et tranquille. Il n’y a que des habitués. Souvent des mecs qui font rien. Tu prends un café le matin, et puis tu squattes toute la journée. Tu discutes toujours avec le type qui tient le bar. En été, il y a une terrasse. »

Les assedic. « Dans le quartier, il y a pas de gens au chômage, donc pas mal de gens aux Assedic. Ca se mélange, ça se rencontre. Quand tu passes 2-3 heures à attendre, forcément, tu discutes. C’est pas Meetic, mais tu rencontres les gens qui vivent avec toi ! »

Le quartier

« Ici, on bouge pas de son petit quartier. La vie, c’est vraiment à l’échelle du micro quartier.

Il y a beaucoup de mecs qui zonent dans la rue. Il n’y a pas d’activités dingues, mais c’est ouvert, c’est populaire.

C’est ça que j’aime, l’état d’esprit. Tout le monde se connaît. Les commerçants se souviennent de toi.
C’est un quartier où tu te fais pas emmerder.

Même si des fois l’ambiance est un peu pourrie, ça ne craint pas. Il y a beaucoup d’écoles, beaucoup d’enfants. »

Convivialité

« Dans la rue, c’est complètement fermé, c’est dans les bars, que tout se passe. »

« Pendant le Ramadhan, tous les bars se transforment en pâtisseries. Dans les cafés reubeus, c’est ouvert toute la nuit et ils organisent des lotos. Tout le monde vient jouer les Juifs , les Chinois. Il y a une ambiance spéciale, c’est cool. »

Le tourisme

« Les gens se déplacent pas pour aller ici. Y a qu’en été, tu croises des Japonais perdus après le cinéma en plein air de La Villette ! Ici, les gens sont cool, s’il y avait des touristes, ça ne changerait pas grand-chose, je crois. La mentalité resterait la même.

Le Paris touristique, je connais, j’ai travaillé sur un bateau mouche, il n’est pas grand. Tu paies 20 € une bière et tu es mal accueilli. Ici, quand tu es à Jaurès, tu peux pas te la péter…

Une ville, ce ne sont pas seulement les monuments, c’est aussi la manière dont on vit. Le seul moyen de connaître une ville, c’est de rencontrer les gens et de vivre avec eux. Sinon, tu ne sais pas où se passent les vraies choses. »

Parisiens, têtes de chien ?

« Moi, je suis un Parisien de génération en génération. Mes 4 grands-parents sont parisiens. J’adore Paris, mais c’est vrai, les Parisiens sont des fous.

Pourquoi j’adore ? Ce doit être l’habitude, je suis chez moi. Je connais tous les travers, mais je les accepte. J’ai eu la chance de pas mal voyager, mais chaque fois que je rentre, je me sens en sécurité, à la maison.

C’est vrai à Madrid, par exemple, les gens sont beaucoup plus sympas. Ici, c’est plus compliqué, il y a un aspect fermé, beaucoup de gens sont aigris.

Mais j’aime ce côté bourru. C’est bien des fois de ne pas être mielleux. Et ça veut dire aussi que les gens sont francs. »

« C’est speed, mais en même temps pas tant que ça. Des fois je me demande pourquoi beaucoup d’étrangers adorent Paris.

Paris, si tu veux connaître, il faut que tu découvres par toi-même. On ne va pas t’aider. On ne donne pas trop d’indications, on ne te dévoile pas les secrets. C’est sûr qu’on n’est pas trop fort pour la pub !

Et puis, il y a les Parisiennes… Je sais pas, elles ont la classe. OK, elles sont un peu hautaines, mais quand tu t’adresses à une Parisienne, tu sais tout de suite à qui tu as affaire. »


Propos recueillis par Clarisse Bouthier, printemps 2006