La ville des gens : 17/décembre
Amnesty International

Justice pour tous …


C’est ce que les membres d’Amnesty International du 19e arrondissement, comme tous les membres de l’association à travers le monde, réclameront aux autorités russes tout au long de la campagne mondiale en faveur des droits humains en Fédération de Russie, jusqu’à la fin de l’année 2003.

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Justice pour les femmes. Elles sont, encore plus que les hommes, victimes de mauvais traitements et de viols pendant les gardes à vue. Elles sont aussi malmenées dans leur propre maison : les autorités russes ont reconnu que 14 000 femmes mouraient chaque année des mauvais traitements infligés par leur mari ou par d’autres membres de leur famille. De plus, dans le Code pénal russe, les violences domestiques ne constituent pas une infraction à part entière. Amnesty demande une modification de ce Code et d’autres mesures pour mieux traiter juridiquement ces violences.


Justice pour les enfants incarcérés dans des conditions très dures, dans des prisons surpeuplées. La Russie a certes ratifié la Convention relative aux droits de l’enfant, mais le Comité des droits de l’enfant s’est déclaré préoccupé, en 1999, par les "allégations faisant état de nombreux cas de torture et de maltraitance" dont sont victimes les mineurs emprisonnés.


Justice contre les discriminations raciales à l’égard des réfugiés, des étudiants africains et des personnes originaires du Caucase, notamment les Tchétchènes. Bien souvent, ces agressions ne sont pas signalées à la police, car les réfugiés ont peur d’avoir des problèmes pour leurs papiers. De plus, il est courant que les forces de sécurité refusent d’enregistrer les plaintes ou minimisent la portée de tels actes. Pourtant la Fédération de Russie est tenue, en tant que signataire de la Convention internationale sur l’élimination de toute forme de discrimination raciale, de prendre des mesures contre toute discrimination "fondée sur la race, la couleur, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique".


Justice contre les discriminations religieuses. De nombreuses églises, considérées comme importées ou concurrentes de l’église orthodoxe (Eglise catholique romaine, Armée du salut, Témoins de Jéhovah) sont en butte à des manœuvres de harcèlement. Entre les engagements internationaux pris par la Russie en faveur des droits humains et la réalité sur le terrain le fossé est large.


La torture pourquoi ?
Parce que la société russe est inquiète face à la criminalité. Parce que la police est mal formée, mal équipée et mal payée. Les policiers sont promus en fonction de leurs "résultats", ce qui les incite à rechercher des "aveux" par tous les moyens. La torture et les mauvais traitements sont monnaie courante pendant la garde à vue période durant laquelle les suspects ont des difficultés à contacter un avocat ou un médecin. Ces aveux extorqués sous la torture sont acceptés par les tribunaux, malgré les dispositions explicites de la loi russe.

Ignorant leurs droits, ou estimant que la plainte n’aboutira pas, les victimes de violences policières portent rarement plainte. Le recours à un médiateur est possible, mais la procédure est longue.

Le nouveau code pénal, adopté en décembre 2001, s’attaque effectivement à certains facteurs qui favorisent les actes de torture et de mauvais traitements. Il reste cependant à s’attaquer à l’impunité. Car ne pas juger et punir ceux qui ne respectent pas les droits humains revient à encourager de telles pratiques et à permettre qu’elles se perpétuent.

Les conditions de détention sont également très préoccupantes. Près d’un million d’hommes, de femmes et d’enfants sont incarcérés en Russie. Parfois, la surpopulation est telle qu’il n’y a pas de lits pour tous les détenus. Ceux-ci sont obligés de dormir à tour de rôle, ce qui favorise la diffusion des maladies contagieuses comme la tuberculose. Ces conditions insalubres constituent, en elles-mêmes, un traitement cruel, inhumain et dégradant.


Et la Tchétchénie
Cette petite République du Caucase, grande comme deux départements français, paie cher sa décision de prendre son indépendance. La première guerre (1994-1996) menée par les troupes russes a coût la vie à 100 000 Tchétchènes. La deuxième guerre a débuté en 1999, lancée par Vladimir Poutine en représailles ’d’attentats meurtriers, attribués aux Tchétchènes, ce qu’ils ont toujours nié.

Depuis, les atteintes aux droits de l’homme n’ont jamais cessé.

D’un côté, les forces tchétchènes s’en prennent à des civils travaillant dans l’administration locale pro-russe. Elles ne cherchent pas non plus à limiter le nombre de victimes civiles lors de leurs attaques contre des soldats russes. Enfin, ces soldats sont souvent maltraités quand ils sont faits prisonniers. D’un autre côté, les forces russes s’attaquent délibérément aux civils. Mary Robinson, ancien haut-commissaire des droits de l’homme à l’ONU a, elle aussi, dénoncé les massacres, les exécutions sommaires, les viols, les pillages et les bombardements de civils.

Le gouvernement russe considère officiellement que le second conflit en Tchétchénie n’est pas un conflit armé mais "une opération anti-terroriste" et ne tient aucun compte des droits des personnes. Au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, cette thèse a soudain trouvé davantage d’écho au sein de la communauté internationale. Les critiques sont devenues moins vives en raison de la "guerre contre le terrorisme" décrétée par le président G. W. Bush. Dans le contexte actuel, les autorités russes ont "les mains libres" pour mener des opérations en Tchétchénie sans tenir aucun compte du respect des droits humains.

Pour ne citer qu’un exemple, on peut évoquer le cas la ville de Sernovodsk, tout près de la frontière ingouche. Le 2 juillet 2001, plusieurs centaines de personnes, dont un homme âgé de quatre-vingt-dix ans et plusieurs enfants, ont été arrêtées par des soldats russes lors d’un raid mené à la suite de la mort de cinq militaires russes, tués par l’explosion d’une mine terrestre. Nombre des personnes arrêtées ce jour-là affirment avoir été torturées ou maltraitées. Certaines disent que les militaires les ont torturées à l’électricité et ont lancé contre elles des chiens d’attaque. La plupart ont été relâchées dans la soirée. Une centaine ont toutefois été conduites dans un centre de détention temporaire. On ignore ce que sont devenues, depuis, au moins six personnes.

Amnesty International regrette que les pouvoirs publics n’aient jamais enquêté sérieusement sur les allégations de violations des droits humains par les forces russes et qu’elles ne fassent rien pour traduire en justice les responsables de tels actes. De ce fait, les forces de sécurité pensent qu’elles peuvent continuer de violer les droits fondamentaux de la population civile tchétchène sans risquer de poursuites. Promouvoir la justice pour tous est l’un des défis lancés par Amnesty International à travers cette campagne sur la Russie. L’organisation recommande de protéger en priorité les personnes vulnérables, victimes de violences graves, et de lutter contre l’impunité qui gangrène la société.

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TCHETCHENIE : UN OFFICIER RUSSE ASSASSINE UNE JEUNE FILLE

Kheda (Elza) Koungaïeva, dix-huit ans, a été enlevée à son domicile, dans le village de Tangui-Tchou, dans la nuit du 26 mars 2000 par des soldats russes commandés par le colonel Iouri Boudanov.

Ce dernier l’a ensuite emmenée sous sa tente pour l’interroger. La jeune fille n’en est pas ressortie vivante. Iouri Boudanov a reconnu l’avoir tuée, mais il a affirmé avoir agi lors d’une crise de "folie passagère".

Le parquet n’a pas pris en compte des éléments de preuve indiquant que la jeune fille a été violée avant d’être tuée. Le colonel Iouri Boudanov a été inculpé d’homicide, d’enlèvement et d’abus de pouvoir. Il est le premier officier russe à être jugé pour des crimes commis contre des civils en Tchétchénie depuis la reprise du conflit, en 1999. Son procès, qui a commencé en février 2001, n’est toujours pas terminé.


LA RUSSIE, PAYS EN TRANSITION

Depuis la dissolution de l’Union soviétique en 1991, ce pays de 144 millions d’habitants s’est doté d’un régime présidentiel. Vladimir Poutine a été élu au suffrage universel en mars 2000, pour un mandat de 4 ans.

La présidence de Boris Eltsine a été marquée par des privatisations massives des entreprises d’Etat et par la mise en place d’une économie de marché. Les infrastructures de la Fédération ont particulièrement souffert, notamment dans les secteurs de la santé et de l’enseignement. De nombreux fonctionnaires n’ont pas été payés pendant des mois. La Russie connaît une situation économique difficile, avec une explosion du chômage et de la pauvreté.

Au plan international, la Russie reste une grande puissance, dotée de l’arme nucléaire. Elle fait partie des cinq membres permanents du Conseil de sécurité des Nations Unies. Elle est membre du G8, le club des pays industrialisés les plus riches du monde et elle fournit des contingents aux forces de maintien de la paix envoyées au Kosovo ou en Bosnie.



Pour plus d’information, vous pouvez lire les différentes publications d’Amnesty International, ou consulter le site de la section française d’Amnesty International

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Article mis en ligne en décembre 2014

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