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Q.L N° 014 - OCTOBRE 1981

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La planche à voile dans le XIXème

Si, c’est possible…

Mais où donc s’arrêtera l’expansionnisme de la planche à voile ? La voici déjà s’infiltrant dans les colonnes de votre journal !

Et ce n’est qu’un début car en fait, son ambition est, après avoir colonisé les plages qui ne lui sont pas encore interdites), et, envahi les plans d’eau intérieurs, de déferler sur Paris… Et pas n’importe où : sur le bassin de La Villette que les lecteurs de Quartiers Libres connaissent, tout du moins ceux qui habitent le Nord du 19ème.

Le bassin de La Villette, qui n’est plus le canal Saint-Martin et pas encore le canal le l’Ourcq d’une longueur d’environ 700m, d’une largeur de 50m à peu près (n’ayant pas sa profondeur moyenne, vous ne pourrez en calculer le volume), vous le trouverez coincé de façon insolite entre la rotonde de La Villette et le pont- levis de la rue de Crimée, avec son air de maquette de la tour de Londres ; et les bâtiments autour de ce pont avec leurs fondations dans l’eau comme les maisons vénitiennes, ce plan d’eau est vraiment particulier par son aspect.

Le dimanche, la navigation fluviale étant interrompue, c’est un des coins les plus calmes du quartier. Bien-sûr les entrepôts qui longent les quais sont d’un aspect pour le moins vétuste mais je suis pour ma part convaincu que la navigation en planche à voile, dans cet endroit, aurait un charme bien personnel. Oh, bien-sûr, ce ne serait pas comparable aux vagues déferlantes du Pacifique et des Iles Hawaï, à ces vagues d’un bleu éclatant comme du cristal de la fameuse baie de Kalua (connue par les amoureux de la planche et fréquentée par un nombre restreint de privilégiés qui peuvent s’offrir le déplacement).

Mais, vous le savez bien, Paris n’est pas en bord de mer ; certains le regrettent, mais jusqu’à maintenant, on ne pourrait finalement pas faire grand-chose. Alors si l’on veut faire de la planche dans Paris, il s’agira de ne pas trop faire les difficiles. A ce jour, pour Le véliplanchiste acharné qui veut pratiquer sa détente favorite en dehors des congés payés, il n’y a pas des quantités de plans d’eau à sa disposition ; le plus proche est celui de la Préfecture de Créteil qui est, en fait, un quasi-monopole attribué à l’ U.C.P.A.

L’autorisation d’y faire dérouler des régates de dériveurs n’est accordée qu’à de rares occasions, quant à la planche à Voile qui, au début était interdite, ( car assimilée à la baignade !), elle est, à ce jour tolérée, sans plus.

L’eau n’ y serait pas très salubre dit-on ; c’est à mon avis un comble puisque ce plan d’eau était auparavant une sablière, et chacun sait les qualités filtrantes de ce matériau. A moins qu’il ne s’agisse là encore que d’une affaire de gros sous ; c’est tellement moins cher d’éviter l’installation d’une centrale d’épuration, et c’est tellement tentant quand on a autant de possibilités, voire de facilités à se débarrasser des eaux usées. Ceci n’est bien-sûr qu’une hypothèse et j’aimerais tant que l’on me prouve qu’elle ne tient pas .

Restent des plans d’eau plus éloignés : la base de loisirs de JABLINES, à moins
d’une heure en voiture de Paris ; le lac, probablement une ancienne sablière, est assez vaste et le cadre est champêtre, mais il faut payer, d’abord pour la voiture, ensuite pour la planche. En somme pour faire de la planche à l’œil, il suffit de venir à pied et sans planche ! Débrouillez-vous après !

Aux dernières nouvelles, il n’est pas encore prévu de taxes d’entrée pour les scoubidous et walkmen.

Le plan d’eau de SAINT-QUENTIN en Yvelines vous attend, si les deux précédents n’ont pas obtenus votre agrément. Oui, à SAINT-QUENTIN, on nous attend, et de pied ferme.

Il y a un tel nombre de planches, en plus des autres dériveurs, que l’organisation y est , dit- on, un tantinet martiale ; gare à celui qui ne voudrait pas s’y soumettre, alors pour les insoumis de la planche à voile, il y a vraiment du "mouron" à se faire quand on habite Paris.

"Et mon ASNIÈRES ? " demandait Fernand Reynaud dans son célèbre sketch du "22 à Asnières" quand il avait l’impression qu’on l’oubliait ; j’ai pour ma part envie de demander sur le même ton "Et mon bassin de La Villette pour les planches à voile ? ". Le 10 mai, tout à changé, nous dit-on ; certains annoncent l’apocalypse politique et sociale, d’autres annoncent le début d’une ère nouvelle.

Je ne vous surprendrais pas en disant, que s’il n’y a pas de planches sur le bassin c’est tout simplement parce que c’est dangereux ; et si c’est dangereux, c’est bien sûr interdit. Pourquoi ? allez-vous me demander. La pollution, encore elle, a frappé !

Ah fichue pollution, on avait bien besoin de t’inventer !

On me taxera de mauvais esprit, mais je trouve cet argument bien pratique ; et il est employé à pas mal de sauces (cf Créteil). C’est peut-être vrai, puisque c’est le service de la Navigation qui le dit. Il doit être au courant, puisque ses bureaux sont sur le quai du bassin. Cependant, j’ai trouvé un article dans la revue de la Fédération Française de Plongée concernant la pollution du canal de l’Ourc pour la partie traversant le Parc de La Villette. Pour les incrédules, il s’agit du numéro 45 de Juillet-Août 1979 ; en voici un extrait :

« … Les résultats d’analyses et les prélèvements ont montré que la très forte pollution organique dont était atteint le canal est en baisse notable, comme on pouvait l’espérer, en raison des dispositions prise par la commission de l’eau. La courbe de la pollution longtemps en hausse, puis stabilisée, est maintenant en en baisse légère.

L’analyse chimique nous révèle une eau qui sans être saine, est compatible avec la vie…Il a été remonté pour observation : plancton,éponges, moules d’eau douce, écrevisses et diverses plantes aquatiques et algues. …Les habitués du canal ressentent cette lente amélioration depuis 2 ans. Les services de la ville de Paris l’observent à travers leurs analyses périodiques… »

Cette étude s’est déroulée le 7 Octobre 78, et bien qu’il n’y ait pas de courant dans le bassin, il y a quant même de l’eau qui a dû couler depuis. Le dix Mai tout a changé… En est-il de même pour l’attitude de l’administration qui se débarrasse des trop curieux derrière une excellente excuse. Ah fichue pollution, on avait bien besoin de t’inventer !

Alors en trois ans cela s’est- il aggravé, stabilisé, ou amélioré ? Les véliplanchistes de Paris ont le droit de savoir, non ? J’avais eu l’idée, il y a quelques années de faire la traversée de Paris en planche à voile, sur la Seine. Je m’excuse,mais n’ayant pas de nom à particule, et la traversée entre des îles du pacifique me paraissant hors de mes moyens(financiers et musculaires), je pensais que je pourrais faire cette première du pont de Charenton à la maison de la radio,un 1er mai, un des rare jour, où il n’y a pas de circulation de péniches. Deux mois avant mon "raid", j’apprends que la très sérieuse Fédération des Industries Nautiques décide d’organiser cette manifestation. Cela tombait bien car on m’évitait ainsi tout un tas de démarches.

Finalement, à une semaine du 1er Mai, la F.I.N annule cette épreuve . L’idée
est reprise par un grand magasin, qui affirmera son image de marque en matière de planche ; et c’est ainsi que la généreuse initiative de la F.I.N est bassement récupérée à des fins mercantiles.

En réalité durant cette journée de la planche à voile, seuls quelques veinards furent autorisés à effectuer quelques démonstrations sur une portion très réduite du fleuve ; la traversée proprement dite ayant été annulée. Il y avait bien-sûr la raison omniprésente de la pollution ! Le plus comique est que quelques jours auparavant ou après, a pu se dérouler normalement la traversée de Paris à la nage (il y avait eu une dérogation exceptionnelle !).

Moralité : on a le droit de polluer un fleuve ; et pas celui de s’en servir sans le polluer !

Finalement ce serait esthétique, toutes ces voiles multicolores, et cela briserait un peu l’uniformité du béton ; un peu d’animation serait ainsi créé pour le plus grand bonheur, des véliplanchistes, des promeneurs, du quartier en fait ; (j’allais écrire fêtes, oui pourquoi pas !).


Revue Quartiers Libres


Article mis en ligne par Mr Antoine Seck, collaborateur à La Ville des Gens, actualisé en septembre 2013.

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